Mireille Flore Chandeup

Cameroun : code pénal, infractions et lien de famille

L’infraction pénale désigne une atteinte aux lois pénales sanctionnée par une peine d’amende, d’emprisonnement ou de mort, doublée dans certains cas de la confiscation des objets ayant servi ou facilité la commission de l’infraction, de la fermeture du lieu de la commission de l’infraction et du prononcé des interdictions à l’encontre de l’auteur et/ou des coauteurs et complices. L’application des sanctions est la conséquence de la reconnaissance de culpabilité, mais celle-ci n’est pas prononcée toutes les fois qu’une personne commet une infraction. Il faut en plus, pour être reconnu coupable, que les circonstances de la commission de l’acte soient telles que la personne concernée puisse être considérée responsable de l’acte commis aux yeux de la loi. Le lien de famille fait partie des circonstances qui, pour certaines infractions, soit libère de la responsabilité pénale, soit aggrave la responsabilité, soit encore la réduit.

Lien de famille et absence de responsabilité pénale

Dans un premier temps, le lien de famille exonère totalement de la responsabilité pénale. De ce fait, les infractions de vol simple, d’abus de confiance simple et d’escroquerie simple ne sont pas retenues entre conjoints, entre ascendants et descendants légitimes ou adoptifs, entre ascendants et descendants naturels jusqu’au 2ème degré s’ils vivent ensemble ou sont reconnus, à l’encontre du veuf ou de la veuve pour les biens de 1ère nécessité ayant appartenu au conjoint prédécédé. Il est de bonne méthode de définir tout d’abord ces infractions. Les éléments qui aggravent le vol et qui font qu’aucune cause d’irresponsabilité pénale ne soit envisageable sont l’utilisation de la violence, d’une arme, d’une fausse clé (ou de la vraie clé sans autorisation du propriétaire), d’un véhicule automobile (pour le déplacement des objets volés par exemple), l’entrée par effraction et l’escalade. Le vol est dit simple si aucun de ces détails ne ressort des circonstances de l’infraction. Il n’y a donc pas de vol simple entre mari et femme (et non entre fiancés, même s’ils vivent sous le même toit). Un fils (ses descendants…) ne peut être condamné pour un vol simple commis à l’égard de son père (ou ses ascendants).

Les éléments aggravants de l’abus de confiance et de l’escroquerie sont les mêmes. Ces infractions sont dites aggravées lorsqu’elles sont commises par un avocat (si un père est financièrement abusé par son fils alors qu’il était censé assurer sa défense, le lien de famille ne protège plus le fils), notaire, commissaire priseur, huissier, agent d’exécution ou agent d’affaires au préjudice de son client, également par des personnes faisant appel au public (le cas par exemple des personnes qui utilisent les médias pour faire croire à un recrutement alors qu’il s’agit d’une escroquerie. Si le conjoint ou un ascendant se voit extorqué de cette manière, l’auteur de l’infraction ne pourra plus bénéficier de la protection légale qu’est l’existence du lien de famille), également par un employeur au préjudice de son employé et vice versa. Si l’escroquerie ou l’abus de confiance a eu lieu dans le cadre des relations de travail entre mari et femme, ascendants et descendants, le lien de famille cesse de protéger l’auteur de l’infraction. Vous vous doutez certainement qu’il faut que le lien de travail soit véritable (existence d’un contrat de travail, subordination véritable de l’employé à l’employeur, rémunération véritable) et non une simple collaboration professionnelle non rémunérée comme on l’observe dans de nombreuses familles. Qui plus est, l’infraction de violation de correspondance n’est pas retenue lorsqu’elle est commise par les parents sur la correspondance de leurs enfants mineurs ou par un époux sur celle de son conjoint.

Lien de famille et aggravation de la responsabilité pénale

Dans un 2ème temps, le lien de famille constitue une circonstance aggravante lorsqu’un meurtre, des blessures graves ou des coups mortels sont commis sur ses père et mère légitimes, naturels ou adoptifs ou sur tout autre ascendant légitime. Ici, les sanctions appliquées sont plus graves.

Lien de famille et atténuation de la responsabilité pénale

Dans un 3ème temps, le lien de famille constitue une circonstance atténuante en cas de meurtre ou d’assassinat d’un nouveau-né, dans le mois de la naissance, par sa mère. Ici, la peine appliquée est réduite.

      NB : les causes d’exonération de responsabilité pénale, les circonstances aggravantes et atténuantes ne s’appliquent pas aux complices et coauteurs qui ne sont pas de la famille de la victime. Ainsi, alors que vous avez soustrait ou extorqué de l’argent au père d’un ami, en complicité avec celui-ci, vous obtiendrez entre 5 et 10 de réclusion, tandis que votre ami sera purement et simplement remis en liberté. Vous obtiendrez une peine plus élevée qu’une dame que vous avez aidée à assassiner son nouveau-né. Celui qui vous aide dans le meurtre de votre père obtiendra une peine moins élevée que la vôtre.


Attention, Aliou a obtenu son permis de conduire

D’abord, c’est vrai ce qu’a dit Ecclésiaste Deudjui. Au Cameroun, on obtient son permis avant d’apprendre à conduire. Ensuite, je vous raconte l’histoire de Aliou, mon voisin, et de son apprentissage de la conduite.

Aliou est un homme tête en l’air

Aliou est un homme avec beaucoup de problèmes. Son épouse est décédée à la fleur de l’âge, le laissant avec leurs 5 enfants à élever. Le chagrin a fait de lui un homme désorienté et très très très peu sûr de lui. Il oublie tout partout. Lorsque tu parles avec lui, tous les mots que tu prononces lui rappellent une chose oubliée quelque part. Tenez! Un jour pendant que nous bavardions à l’Agora (c’est comme çà qu’on appelle le parlement de mon quartier), une vendeuse d’avocats est passée près de nous. Le gars s’est souvenu qu’il en a achetés quelques uns 2 semaines auparavant et qu’il les a conservés dans un tiroir de sa cuisine. Imaginez vous-même si ces avocats seront encore en état d’être consommés! Un autre jour, il s’est souvenu avoir oublié des beignets de farine dans son sac à dos depuis 2 jours. Un jour encore, il a oublié le repas en cuisson sur le réchaud à gaz et est allé dormir. Bref, c’est un homme tête en l’air.

Aliou a décidé d’apprendre à conduire

Aliou décide un jour de se mettre à la conduite. Il obtient d’ores et déjà son permis, comme ça se passe. Il faut à présent apprendre à conduire. Il fait alors appel à un ami du coin qui a une voiture. Lui donner des cours s’est avéré être un véritable parcours de combattant. Non seulement il ne parvient pas à mémoriser les différentes manettes du véhicule, mais il veut apprendre à conduire pieds nus. Avec les chaussures, la voiture ne lui serait pas « sensuellement » perceptible. Manœuvrer alors relève pour lui de la sorcellerie. Lorsqu’il y parvient un peu, il a si peur des rigoles et caniveaux qu’il roule pratiquement dans le sens interdit. Même les milliers de klaxons derrière lui ne le convainquent jamais de se ranger sur le côté pour laisser passer les autres.

Aliou a de toute façon déjà son permis. Je le vois finalement au bord de sa Toyota Avensis un jour. Je suis si choquée que des personnes meurent sur nos routes à cause des Aliou qui veulent à tout prix être véhiculés. Un type qui sort de son véhicule tous les jours en oubliant systématiquement de fermer la portière. Un type qui gare ou fait un débordement avant de se rappeler qu’il devait actionner le clignotant…

La morale de l’histoire

Les permis de conduire sont délivrés à la va vite. Les moniteurs des auto écoles avancent au rythme de l’apprenti qui vient un jour et zappe le lendemain. Il sait qu’il apprendra par la suite au quartier, avec son permis en poche.

Nous devons prendre conscience chacun à son niveau que les mauvaises attitudes et habitudes ont des répercutions sur tout le monde. La blogueuse camerounaise Carole Leuwé nous le montre fort bien, ICI. Un moniteur devrait donner son avis, lorsqu’il est défavorable, avant l’attribution du permis à un usager. Une enquête de moralité devrait être faite sur la personne. C’est possible. Ce serait utile et sauverait des vies. La conduite n’est pas une aventure. C’est sérieux!

Des Aliou, nous n’en voulons plus.

#StopAuxAccidentsRoutiers

Ma contribution.

 


Témoignage d’un séjour à l’hôpital (2) : mes rencontres avec la mort

C’est bien connu ! L’hôpital est le lieu le plus indiqué si on veut comprendre tous les malheurs du monde. Tous les hasards et barbaries de la terre viennent y échouer. D’un côté, on sauve le coup et on redonne la vie. D’un autre côté, on constate la mort et la vie n’est plus. Mon séjour dans un de nos hôpitaux pendant que je donnais la vie m’a permis d’en apprendre plus sur la vie et la mort.

Je me remets peu à peu de 24 heures d’immobilisation après une césarienne réussie. L’infirmier major m’informe que je dois me lever et faire quelques pas. Je ne savais pas que c’était possible après seulement 24 heures. J’ai cette grande entaille sur le bas du ventre qui me fait un mal de chien, mais si je veux me remettre plus vite, je dois suivre les conseils des infirmiers. Le corps baissé par crainte de faire saigner mon pansement, j’avance doucement dans les couloirs du service de chirurgie. Des gens s’affairent çà et là, chacun son souci. Je grimace de douleur. Cependant, mes oreilles sont attentives aux problèmes des autres. Ils m’ont tout de suite l’air plus difficiles à surmonter que les miens. Comme je devais faire de tels petits pas dans le couloir régulièrement, je décidai d’en revenir à chaque fois avec quelque chose à raconter dans mes écrits.

Une jeune femme meurt en donnant la vie

J’ai fait la connaissance de cette femme à la maternité le jour où j’y ai été admise. Elle avait les contractions depuis 24 heures. Le col de l’utérus était complètement dilaté, mais le bébé ne venait pas. J’entendais l’infirmière lui dire que le bébé était en souffrance. Le médecin était venu lui expliquer quelques heures avant mon arrivée qu’elle ne pouvait pas donner naissance par voie basse. C’était un cas de disproportion céphalopelvienne comme le mien. En bref, le verdict du médecin était clair : la tête du bébé étant plus grosse que le bassin osseux, une césarienne devait être pratiquée sans plus attendre.

Cette femme de 34 ans, déjà mère de 4 enfants, avait refusé d’envisager la césarienne (c’est pourquoi je l’avais trouvée en souffrance à mon arrivée à l’hôpital). Elle ne comprenait pas comment elle avait pu accoucher « normalement » quatre fois de suite, et qu’on lui dise cette fois-ci qu’elle devait être opérée. Je me souviens l’avoir entendu dire à mon égard, alors que je me dirigeais vers le bloc opératoire : «elle vient d’arriver avec ses petites douleurs (j’étais en travail depuis 6 heures de temps seulement) et elle accepte de se faire opérer ? Moi je préfère mourir plutôt que d’accepter l’opération, parce-que les sorciers de mon village me guettent pour m’achever sur la table d’opération. Jamais !»

J’arpentais donc tout doucement les couloirs de la chirurgie lorsque subitement des femmes se mirent à pleurer et se roulèrent par terre. «C’est fini ohhh ! C’est fini ! Ils l’ont eue. Ils l’ont achevée», disaient-elles en pleurant. Des bouches murmuraient déjà ce qui était arrivé à la dame qu’on pleurait. «C’est une dame qui est morte sur la table d’opération», entendis-je près de moi. Qu’a-t-il bien pu lui arriver ? L’infirmier major m’expliqua alors qu’il s’agissait de la dame qui refusait depuis 48 heures de subir une césarienne. Les contractions, de plus en plus douloureuses, doublées de la tension en nette augmentation, ont provoqué une crise d’éclampsie. Les médecins ont dû alors préparer le bloc pour extraire le bébé. La mère est malheureusement décédée dès l’entrée dans la salle qui lui faisait si peur. La mort de cette femme m’a fait réaliser à quel point la frontière entre la vie et la mort est mince et comment prendre une décision utile à temps peut sauver une vie.

Un enfant meurt étouffé par un aliment

L’hôpital était calme cet après-midi là. Trois jours que j’avais subi ma césarienne et j’avais désormais assez de force pour me balader jusqu’au service de pédiatrie situé à quelques mètres de l’entrée de l’hôpital. Tandis que je raccompagnais une amie jusqu’au portail de l’hôpital, une voiture se gara brusquement et une femme en sortit avec un enfant d’environ 10 mois dans les bras. Elle s’écriait de toutes ses forces : « sauvez mon enfant, s’il vous plait ! Il s’étouffe. » Une infirmière du service des urgences lui prit l’enfant dans les bras en lui demandant si elle savait ce qui l’étouffait ainsi. La dame jura que non. L’infirmière s’affaira à lui sauver la vie, en lui introduisant une sonde, je crois, dans la gorge. L’enfant vomit du coup quelque chose de pâteux et d’une blancheur étonnante. A la vue du vomis, la mère se souvînt que son fils jouait près d’une cuvette pleine de farine de manioc.

Vous vous souvenez peut-être que j’ai récemment publié un billet Journal d’une mère au foyer, dans lequel je vous parlais de cette manie que nous avons de tout laisser traîner, au détriment de la santé et de la sécurité des plus petits, qui testent tout avec leur bouche. Eh bien, cette maman là faisait partie de ces femmes qui laissent tout traîner, y compris des aliments solides comme la farine de manioc. C’est une farine obtenue à base de tubercules de manioc trempés, découpés en petits morceaux et séchés, avant d’être écrasée. Elle est conservée de préférence en morceaux, qu’on écrase le jour où on veut la cuisiner. Ces petits morceaux séchés présentent un degré de dangerosité avancé pour un bébé. La maman l’a appris à ses dépens ce jour-là. Son fils finit par mourir étouffé.

Là je dois avouer que cette mort ci m’a fait plus de peine que la première. L’événement m’a poussé à me terrer dans la salle d’hospitalisation pour le reste de la journée et de mon séjour.

Une femme qui meurt de suffocation

Lors de ce riche séjour, je suis allée de rencontres en rencontres. Arrive le 5ème jour, il est prévu que je regagne la maison mais je tombe encore nez à nez avec la mort. Mince ! Lorsque je suis sur le point de passer le portail de l’hôpital, je vois deux gaillards qui portent une dame visiblement inconsciente. « Elle s’est évanouie dans sa boutique. Elle s’est évanouie, je vous dis. Elle ne respire plus. » L’un des hommes qui la portaient était nettement plus affolé que l’autre. C’est lui qui criait ainsi pour ameuter les infirmières qui avaient pris leur pose. Il était 13 heures et 30 minutes. Je me demande encore aujourd’hui comment les infirmières d’un service d’urgences peuvent prendre leurs poses toutes au même moment.

L’homme criait donc si fort qu’un infirmier sorti de nulle part vint s’enquérir de ce que la dame avait. Il comprit que c’était grave. Je le sus parce qu’il fronça le visage. La dame fut transportée dans la salle des urgences proprement dite. L’infirmier sortit 5 minutes après pour annoncer sa mort aux hommes qui l’avaient emmenée. Pendant qu’ils laissaient éclater leur peine, je m’attelais à glaner des informations sur les causes de sa mort. Il fallait vraiment que j’en ai plus à vous raconter.

La dame était propriétaire d’une cafétéria en face de l’hôpital. Très bon emplacement pour ce business. Un achalandage important, des malades, mais aussi une grande clientèle de médecins, infirmiers, sages-femmes… La dame faisait aussi restaurant l’après-midi. Elle travaillait ainsi depuis une dizaine d’années. Dix ans au contact de la chaleur. Elle avait été cambriolée par des hors la loi sans scrupule quelques semaines avant sa mort, cela l’avait décidée à sceller la fenêtre par laquelle ils étaient passés pour pénétrer dans la boutique. En le faisant (et sans le savoir), elle empêchait ainsi l’air de sa boutique habituellement très chaude de se renouveler à souhait. Le jour de sa mort, le soleil était très chaud. Elle a fini par s’évanouir dans sa boutique où elle fut découverte par un client venant se régaler devant un plat de Bongo Tchobi.

J’en avais assez entendu. Je montai finalement à bord du taxi que j’avais appelé et qui commençait à s’impatienter.

Prendre les bonnes décisions, avoir les bons gestes, c’est crucial.

Des rencontres avec la mort, j’en ai eues lors de ce séjour pendant lequel j’ai donné la vie. La vie est ainsi faite. Il y a la vie et il y a la mort.

 


Sous l’emprise d’un « bonbon » pasteur

«Il y a des bons pasteurs et des bonbons pasteurs. La bouche sucrée, il prêchait comme jésus. Mais ne soyez pas surpris! Vous-même vous le savez. Y a des gens à Abidjan qui ne peuvent pas voir église passer». Ce refrain d’une chanson autrefois célèbre venant de la Côte d’Ivoire n’a jamais cessé de résonner dans la tête. Des gens qui ne peuvent pas voir église passer, on n’en trouve pas qu’à Abidjan malheureusement. Il m’arrive régulièrement de vérifier près de chez moi au Cameroun ce qui est dit dans la célèbre chanson. En effet l’arrivée massive des églises dites « de réveil », mais que nous appelons volontiers « églises réveillées », a dévoilé une catégorie de citoyens faibles d’esprit. Des personnes tellement fragiles qu’elles croient qu’un être humain peut les conduire à la droite de Dieu.

Les meneurs de ces églises de réveil trouvent leur arme dans la manipulation des consciences. Maîtres dans l’art de la stratégie et de la démagogie, se disant inspirés par Dieu, ces hommes réussissent à amener des personnes visiblement saines d’esprit à s’immoler par le feu pour rejoindre Dieu. Chose surprenante, les adeptes de ces églises n’accordent aucun crédit aux mises en garde données à travers les médias. Des informations passent en boucle à la télé, avec images à l’appui, mais ces adeptes n’en ont rien à foutre. Elles sont convaincues d’être sur le seul vrai chemin pour parvenir à Dieu.

L’histoire de ma voisine Kuinkam

Kuinkam fait partie de ces personnes qu’un meneur d’une église dite des « vrais et uniques enfants de Dieu » a réussi à entraîner dans sa folie. Elle est femme au foyer, mère de 5 enfants. Le dernier a tout juste un an. Son mari travaille à des centaines de kilomètres de leur maison et ne réside par conséquent pas avec sa famille. Loin des regards et du cœur de son mari, elle a réglé son horloge journalière sur celle de son église. Son « prophète » organise des séances de prière tard dans la nuit. Partie tous les soirs de sa résidence vers 18 heures avec son plus jeune enfant, elle n’y revient que vers 5 heures du matin, laissant ses autres enfants passer la nuit seuls, sans surveillance. Selon elle, ses enfants dorment avec Dieu dans la maison pendant qu’elle se rend à ses séances de prière nocturnes avec le même Dieu. Dieu n’est-il pas omniprésent de toutes les façons?

les femmes en avant lors des prières nocturnes. Elles sont très nombreuses, des Kuinkam.
les femmes en avant lors des prières nocturnes. Elles sont très nombreuses, des Kuinkam.

Kuinkam mène une vie solitaire. Elle vit repliée sur elle-même et n’adresse plus la parole qu’à son pasteur et autre fidèles de son église. Famille, voisins, amis et autres connaissances ont été mis sur liste rouge. Elle est désormais convaincue que le diable se cache parmi ces personnes. Elle n’a plus jamais, je dis bien jamais, dévoilé le joli sourire qu’elle arborait avant avec nous, ses amies mères au foyer. J’ai retourné la chose plusieurs fois dans ma tête. Je me suis résolue à me dire que ce n’est pas de sa faute.

Délaissée par son mari, elle a trouvé refuge dans les bras de son pasteur et de Dieu

Non, ce n’est pas de la faute de Kuinkam si elle s’est laissée dérouter par cet homme dit pasteur. A un moment de sa vie où elle escomptait beaucoup d’amour de la part de son mari, ce dernier a trouvé du boulot dans une autre région du pays d’où il ne revient que tous les 3 à 4 mois. Elle se sentait seule et le pasteur de son église y a trouvé une brèche. De fil en aiguille, le pasteur s’est installé dans sa vie. C’est lui qui lui dit avec qui elle doit communiquer, qui elle doit même regarder. Il l’amène à éviter les personnes susceptibles de la dérouter de leur Dieu si prenant. La vérité c’est que le meneur pousse les adeptes à vivre coupés de leurs anciennes connaissances car ces dernières ne trouveront pas normal le changement radical de mode de pensée et de vie observé. Le meneur pour continuer de faire passer sa pilule a besoin de maintenir ses adeptes dans une sorte de dormance et de latence.

cette femme sait que ce pasteur est son seul moyen pour résoudre ses multiples problèmes
cette femme espère une délivrance. Elle est persuadée que ce pasteur est le seul moyen pour résoudre ses multiples problèmes

Comment comprendre en effet qu’une personne encore lucide puisse confier les clefs de sa maison, les coordonnées de son compte bancaire, les clefs de voitures à un pasteur rencontré il y a peu?

Ce qui est arrivé à Kuinkam arrive tous les jours à de nombreuses personnes, surtout des mères au foyer. La raison est que les femmes sont plus enclines à écouter des gens qui leur promettent le ciel dans leur vie de tristesse et de douleur. Elles ressentent constamment le besoin d’être cajolées, chouchoutées, rassurées. Les mères au foyer croient à ces pasteurs comme elles croient aux marabouts de chez nous, et je ne parle pas des oiseaux là. Les blancs pourraient les appeler les médiums, ces gens-là qui lisent votre avenir sur des cartes, ou qui vous font croire qu’on peut lire l’avenir d’un être humain. Mais les marabouts utilisent plusieurs objets divers pour vous lire l’avenir et prédire le mal absolu et la mort certaine jusqu’à ce que vous vous résolviez à leur donner de l’argent pour changer cet avenir. Lorsque je parle de marabouts, je sais un peu de quoi je parle.  Le cousin marabout de ma mère, voyant que je suis devenue une mère au foyer, a récemment voulu tester son venin sur moi. Imaginez-vous tranquille chez vous, que votre frère que vous respectez vous appelle pour vous dire que vous avez été empoisonné, que vous allez mourir dans un mois grand max, et que si le poison ne vous tue pas, vous mourez des suites d’un accident de la circulation! Voilà! C’est de ça que je parle, cette façon d’utiliser la peur, surtout de mourir, pour endoctriner des centaines de personnes. C’est le point commun entre les pasteurs des églises dites de réveil et les marabouts. Dès que vous croyez fort que vous serez victime d’un accident de la circulation, vous avez peur de circuler dans la rue et êtes obligé de vous remettre à Dieu ou au marabout, ou aux 2 pour certains. Et c’est bien dommage!

En réalité, l’Etat a démissionné de la protection de ses citoyens

Pour moi, le plus grand fautif c’est l’Etat. D’un côté, un pasteur a son visage placardé sur une surface de 6 mètres carrés, à 10 mètres du sol, dans tout le pays. D’un autre côté, le mal être des populations est tel que : soit tu développes assez de cran pour aller mourir ou te faire cueillir à Lampédusa par des pêcheurs têtus qui ne respectent pas la loi, soit tu t’en remets au marabout de ta famille qui connait le nom de celui qui te maintient dans ta pauvreté, soit encore tu suis un bonbon pasteur manipulateur qui utilises Dieu pour te contrôler et t’extorquer le peu que tu possèdes.

Des personnes faibles d’esprit existent partout. L’Etat devrait prendre certaines mesures pour les protéger des prédateurs tels que les meneurs de nombreuses églises. Corser par exemple les conditions d’ouverture de ces églises par la vérification de la moralité des pasteurs est possible, puisque les gars fouillent grave sur toi quand il s’agit de recruter dans l’armée. On pourrait aussi légiférer que les pasteurs ne devraient pas recevoir des fidèles au-delà de certaines sommes d’argent, où que les personnes âgées devraient faire approuver leurs dépenses dans ces églises par leurs enfants majeurs…Notons surtout que des fragiles gens sombrent dans la dépression pour des raisons tellement variées qu’elles ne devraient pas être livrées à elles-même dans la vie, face à ces gourous.

Moi je dis aussi ce que je pense hein. D’ailleurs, j’ai dit au cousin de ma mère, manipulateur sadique, d’aller chasser ailleurs. Je jouis encore de toutes mes facultés mentales. Ce qui n’est pas le cas de Kuinkam qui a commencé à prier partout : en prenant sa douche, sur le chemin du marché… Lorsque tu la regardes, elle fronce le visage comme pour dire « halte à toi, démon! ». Je crains qu’elle ne sombre dans la folie.

Ces pasteurs de folie en folie, partout dans le monde : un pasteur nigérian embrasse les fesses nues de ses fidèles

un pasteur américain prêche nu et encourage ses fidèles à venir nus aux réunions

Un pasteur sud-africain prêche dans un cercueil

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Lettre à ma coépouse

«Stp, laisse « notre mari » rentrer à la maison! C’est la rentrée scolaire! Les enfants n’ont toujours pas été inscrits».

La coépouse désigne l’autre épouse de mon mari, dans un mariage polygamique. Le mari s’y sent comme un roi. Il fait le tour des différentes résidences de ses femmes à un rythme qu’il choisit en fonction de plusieurs paramètres. Si les résidences sont distantes les unes des autres, le mari peut passer une semaine, voire plus, chez chacune de ses épouses. Si les résidences constituent juste des chambres dans la même grande maison, le mari peut passer une ou deux nuits chez chacune de ses femmes. Lorsqu’une femme a accepté d’être dans ce type de mariage, elle multiplie les artifices pour passer plus de temps avec son époux, tout pour léser les autres femmes, ses coépouses.

Dans la culture africaine, celle qui n’est pas corrompue par les mots occidentaux tels que l’envie et la jalousie, chacune des femmes respecte la relation du mari avec les autres. Toute femme mariée sait qu’à tout moment une coépouse peut venir remettre en question l’harmonie de son couple. Une femme africaine, une vraie, sait qu’elle ne peut s’opposer à l’arrivée d’une coépouse. D’ailleurs, dans les coins où la femme doit faire les champs pour nourrir la famille, tandis que le mari lit son journal en buvant son vin de palme ou de raphia, il peut être surprenant pour les esprits non avertis de voir une femme souhaiter l’arrivée d’une coépouse pour alléger les travaux champêtres. De même, la femme qui ne souhaite plus avoir d’enfant cherche elle-même celle avec qui son mari devra continuer à en faire.

La maîtresse ou 2ème bureau : une coépouse à part entière

Ce qui est surprenant dans la conception de la polygamie c’est qu’on considère aussi comme coépouse la maîtresse attitrée du mari. La femme cocue sait que c’est elle la fautive. C’est elle qui a poussé son mari dans les bras d’une autre femme. Elle a par conséquent intérêt à accepter la nouvelle situation qui s’impose à elle, si elle ne veut pas être abandonnée. L’épouse connait le domicile de sa coépouse illégitime. Elle respecte les jours que son époux y passe. La situation est encouragée par la société. Ce qui donne souvent des ailes à la maîtresse qui use de stratagèmes pour devenir l’épouse, la légitime. La maîtresse n’a pas autant de patience que sa coépouse légitime. Elle n’en a rien à faire des allées et venues du mari chez l’autre femme.

Lorsqu’une mère au foyer se fait finalement voler l’homme qui s’occupe d’elle financièrement, elle en vient à supplier sa désormais coépouse de le lui laisser par moment, surtout lorsqu’il s’agit de payer les factures. Quatre jours après la rentrée scolaire du 5 septembre dernier, elle se résout à adresser cette lettre à sa coépouse, le nœud dans la gorge.

 «Ma sœur, mon amie, je sais que notre mari a choisi de passer désormais toutes ses nuits chez toi. Je sais que par le passé je t’ai rendu la vie difficile. Puisse Dieu fendre ton cœur et y mettre la force de me pardonner ! Ceci est le cri d’une femme qui souffre. Tu es une femme. Et je sais que tu ne permettrais pas que je subisse ce que tu ne voudrais pas subir toi-même. C’est vrai que tu as des enfants aussi avec notre mari. Mais mes enfants sont lésés depuis plusieurs mois. Ils ne voient plus leur père. Ils sont insuffisamment nourris, faute de moyens. Voici déjà 4 jours que leurs camarades vont à l’école. Je commence sérieusement à me demander si notre mari a l’intention de payer leur scolarité. Le bailleur commence désormais sa journée en menaçant de me mettre à la porte. S’il te plait, ma chère coépouse, tu sais que notre mari a les moyens de s’occuper de nous tous. Demande lui de m’envoyer de l’argent pour ses enfants!

Je te promets que je ne mettrai plus en doute l’amour qui vous unit. Je ne te demande pas de lui dire de revenir vers moi. Je sais que ce serait mission impossible. Je te conjure juste d’intercéder en ma faveur pour que nos enfants aillent à l’école. Tu sais, ce sont nos enfants, ce sont TES enfants. Si je pars avant toi, c’est toi qui sera leur tutrice. Ne les laisse pas tomber! Fais quelque chose pour TES enfants, STP!»

Suppliée comme çà, la coépouse illégitime se voit pousser des ailes. Elle sait qu’elle n’est pas légalement unie à l’homme qu’elle aime. Cependant, elle sait aussi que le vrai problème c’est de savoir qui profite de la présence et des revenus du mari.

Si vous trouvez çà improbable, c’est que vous n’avez pas encore compris de quoi je parle. Cette souffrance incessante qui est celle des mères au foyer chez nous.