Mireille Flore Chandeup

Ma première fois, j’ai piloté l’avion jusqu’au septième ciel

Vous avez dit « 7ème ciel » ?

Comme cette expression sonne bien dans les oreilles de la fille pucelle ! Moi en tout cas, cette expression me faisait si frémir que je décide de rompre mon pacte de virginité, après que j’ai échoué au Baccalauréat en 2002.

Fillette, j’adulais les couples sérieux de mon quartier et je voulais leur ressembler. Bien plus, je me disais que je ne ferai l’amour qu’avec un seul homme qui deviendra mon époux. Pas facile hein ! Une chose était surtout bien claire dans ma tête : je ne sauterai le pas qu’après avoir obtenu mon Baccalauréat. Les fameux résultats tombent en juillet 2002. Je ne suis pas admise. Puis je me dis : « noooooon, qui va encore attendre 1 an pour toucher aussi le 7ème ciel ? » Je suis obligée de trouver quelqu’un qui m’y emmènera. Je n’ai pourtant pas de petit ami. Que faire ? Se vendre. Pas se livrer à la prostitution hein !!!! Juste se faire belle pour être remarquée par les garçons. Mireille d’autrui change du tout au tout. Je me maquille désormais. J’arbore des jupes courtes. Je laisse pousser mes cheveux. Je fais du régime. Et ça marche ! Un jeune animateur de mon quartier s’intéresse à moi.

La peur de ne pas être à la hauteur de ses attentes

Je viens d’échouer brillamment au Bacc parce que je pensais plus au 7ème ciel qui m’attendait après la réussite qu’aux études. Je n’ai jamais embrassé un garçon de toute ma vie. Et je me retrouve avec cet animateur, jeune mais expérimenté, aimé des filles pour sa voix suave au micro. « Mon frère, que ce n’est pas toi Jason Black, Ampis Atango ou Francis la plage ? Toi c’est donc qui, avec une voix de stars de la radio comme ça ? » Mireille avait gagné le jackpot. Allais-je alors m’en sortir ? Je demande conseil à mes aînées. Chacune m’aide comme elle peut. Je grave tous les conseils quelque part en sécurité dans ma tête, et me voilà lancée dans une relation avec la star du coin.

Trois mois plus tard, après moultes jongleries (il ne fallait pas qu’il croit que je suis une fille légère), j’allais enfin vivre mon 1er baiser. Seigneur, aide-moi ! Ses lèvres touchent les miennes délicatement. Comment réagir ? Que faire ? Pour lui rendre son baiser, dois-je remuer les lèvres comme si je mâchais des aliments ? Ne vais-je pas inonder sa bouche de salives ? Faut sûrement que je ferme les yeux. Il paraît que ça signifie qu’on est amoureuse. Dès que je sors de mes pensées, il arrête de m’embrasser. Est-ce moi qui l’ai déçu ? Non, quelqu’un arrive. Non, nous ne sommes pas dans une chambre. Oui, nous sommes en plein air, cachés parmi des bananiers derrière la maison du voisin. Aller chez lui allait signifier pour moi que je suis prête à faire l’amour.

J’allais finalement passer à l’acte

Vînt alors le 14 février 2003 ! Ce matin-là, je me dis que trop c’est trop et qu’aujourd’hui c’est aujourd’hui. C’est la fête des amoureux. Nous nous verrons forcément. J’ai cotisé grave pour lui préparer un cadeau digne de ce nom. J’ai acheté un micro afin qu’il n’ait plus besoin d’en emprunter aux amis pour ses présentations.

Vers 20 heures, nous nous retrouvons dans sa chambre. Si je suis dans sa chambre c’est que je veux faire l’amour. Il l’a compris rapidement et ne veut pas perdre de temps.

Etape 1 : les préliminaires

Je suis la 1ère à toucher les objets (Montre, boucles d’oreille, chaîne) que je porte sur moi, tout en le regardant langoureusement. Il me les enlève délicatement en baisant chacune des parties qu’il frôlait en passant. Puis, il se saisit de mes lèvres. Il m’embrasse en s’appuyant contre moi pour m’indiquer que je dois m’allonger sur le lit.  De mes 2 mains et pendant qu’on s’embrasse chaleureusement, je déboutonne la chemise de soie qui dessinait si bien ses tablettes de chocolat. Ses mains à lui descendent le long de mes cuisses, passent sous ma robe, remontent tendrement et dégrafent mon soutien-gorge. Je sens mes seins respirer et se hisser. Ces mêmes mains redescendent et se saisissent de ma petite culotte. En même temps, je défais la braguette de son pantalon. Ma main gauche sent sa verge qui se met en position de commandement, paré au combat. Alors là, nous nous levons du lit comme après avoir subi des électrochocs. Chacun retire d’un coup sec ce qui lui reste de vêtement.

Pour faire durer la chose, je décide de lui faire une fellation digne d’un film porno. Tout çà pour une 1ère fois ? Oui, tout çà pour une 1ère fois. Je l’avais souhaité et pensé du début à la fin. Et je m’étais renseignée, croyez-moi. Je m’agenouille alors pour être à la hauteur de ses bijoux de famille que je saisis délicatement avec ma bouche. Je reproduis à la lettre ce mouvement de vas et vient que j’ai observé dans un film porno. De la base à la tête de sa verge, de la tête à la base, j’humecte au passage, en évitant soigneusement de ne pas le pincer avec mes dents. Je n’hésite pas à recracher dessus le trop plein de salive buccale que je répands à l’aide ma main, en caressant les poils de la base. Mon animateur me saisit alors de ses 2 mains et m’amène à me lever. Je comprends qu’il n’en peut plus et que l’heure de l’accomplissement est arrivée.

Etape 2 : la pénétration proprement dite

Lorsque je comprends qu’il fallait à présent recevoir l’homme au plus profond de moi, je m’allonge sur le lit, écarte les jambes et pose un pied sur le mur de la chambre pour pouvoir supporter cette position que je découvrais ce jour-là. Il pose les genoux sur le lit, vient à moi et me caresse la joue de sa main droite comme pour me dire de ne pas m’inquiéter et qu’il allait me ménager. Il pose le coude gauche près de ma tempe droite. De sa main droite, il utilise sa verge pour me caresser le pubis qui réagit en se dilatant savoureusement. Il y va vraiment tout doucement, pour me laisser le temps de m’humidifier avant de me pénétrer complètement. La tête de sa verge franchit la porte. Je suis submergé de sensations. Entre saveur et douleur due à la rupture de l’hymen. Je me retiens de lui montrer que j’ai mal, mais il le perçoit. Il me rassure avec le regard et continue de me pénétrer. Des vas et vient répétitifs, mais plus doux que je ne m’imaginais. Puis, je sens qu’il accélère le mouvement comme piqué par un moustique. Je ne comprends pas. C’est lui, tout gentil qu’il l’était ce jour-là, qui m’explique que c’est parce qu’il va jouir.

Une 1ère fois, zéro préservatif

Je ne saurai expliquer aujourd’hui pourquoi j’avais fait l’amour pour la toute 1ère fois sans me protéger des maladies et d’une grossesse indésirable. Je voulais juste le faire, pour rattraper enfin mon retard. J’étais véritablement persuadée d’être en retard. Je ne connaissais aucune élève de Terminale encore vierge. Pendant que nous faisons donc l’amour, il doit jouir. Vais-je alors permettre qu’il déverse sa semence dans mes entrailles ? Tout se défile dans ma tête. Je pense à la méthode du coït interrompu. Il faut qu’il se retire ! Puis, je me souviens que l’enseignante de puériculture disait que ce n’est pas une méthode fiable, que des spermatozoïdes sont déjà libérés avant l’éjaculation. Alors là, je me dis que ce n’est plus la peine qu’il se retire. Comme on dit chez nous : mouillé c’est mouillé, il n’y a pas de mouillé sec ! Nous savourons alors tous les deux les bienfaits d’une éjaculation interne, avec tous ses risques. Insoucieuse, je le regarde s’endormir dans mes bras jusqu’à ce qu’une sonnerie vienne nous perturber. Nous avions programmé un réveil pour ne pas nous laisser emporter et oublier  de retourner à nos vies, surtout moi de retourner chez mes parents.

C’était donc ça le 7ème ciel dont mes aînées parlaient avec autant d’extase.

Ma 1ère fois m’a tellement fait vibrer que nous avons passé plusieurs mois à faire l’amour, au point où j’ai échoué à nouveau  au Baccalauréat en juillet 2003. J’ai dû me « revirginiser » jusqu’à l’obtention de mon baccalauréat en 2004.


Valérie face à la pression de l’enfantement

Lorsque donner naissance est une « obligation morale » pour toutes les femmes, que ne feraient-elles pas pour avoir un bébé ?

Une société focus sur l’accouchement

Dans les sociétés africaines, la femme est considérée comme une « donneuse de naissance » automatique, à un tel point que celle qui n’a pas d’enfant est vue comme une moins que femme. Mariée, la femme doit enfanter ; sinon elle est répudiée par son époux. Une femme chanceuse devra juste supporter d’avoir une coépouse qui fera des bébés à sa place, pour le grand bonheur de leur époux commun. Célibataire, on vous juge sur la base de votre âge apparent. « Elle est déjà quand-même vieille hein ! Il faut qu’elle accouche, même si elle n’est pas mariée ! »

Une grosse pression psychologique

Selon le moral de chaque femme, la pression sociale est ressentie et vécue différemment. Les plus fortes se disent : « je me fous de ce que les gens peuvent penser. Ca ne regarde que moi de toutes les façons. » Les moins fortes ont de la peine à lever la tête lorsqu’elles sortent de leurs maisons. Elles se demandent constamment comment faire pour enfin faire plaisir à la société. Elles s’inventent régulièrement des fausses couches ou des maladies incurables qui les empêcheraient de tomber enceintes. Les femmes faibles sont plus affectées. Elles développent des grossesses nerveuses et perturbent leur système hormonal de façon assez spectaculaire. Les plus faibles finissent par craquer et  avoir un comportement démoniaque. Elles feignent une grossesse jusqu’au bout et sont prises au piège à la fin. C’est le cas de Valérie, la trentaine.

La réaction de Valérie face à la pression sociale

Valérie (j’ai gardé son prénom pour compatir à sa situation) est une femme de 34 ans que je connais depuis 2 ans. Elle aménage près de chez moi en 2015 avec son époux et leurs deux enfants de 14 et 12 ans. Elle était enceinte et brillait des milles feux. Je me souviens que nous autres voisines commères nous demandâmes comment on pouvait être aussi jolie avec une grossesse. Elle était forte, marchait très vite et ne transpirait jamais. Quelques mois plus tard, en 2016, son ventre avait disparu et elle nous a dit qu’elle avait donné naissance à un mort-né. Nous fumes tristes pour elle, mais très vite rassurées car elle ne tarda pas à tomber enceinte à nouveau. En dehors du ventre qui grossissait au fil des mois, elle ne présentait toujours aucun autre symptôme fréquent de grossesse : fatigue, chaleur intense. « C’est ma troisième grossesse et c’est toujours pareil. Je me sens toujours en pleine forme jusqu’à la fin. J’ai juste la malchance. J’accouche, l’enfant meurt à chaque fois », m’avait-elle confié un jour.

Vînt alors le moment de l’accouchement. Plusieurs mois se sont écoulés depuis qu’elle feint la grossesse. Elle décide d’aller chez sa sœur ainée pour le reste de la grossesse et l’accouchement. Son époux acquiesce, sans se douter une seule seconde de ce qu’elle avait planifié. Une fois chez la sœur, celle-ci découvre qu’il n’ya pas de grossesse et qu’à la place, sa sœur cadette porte une prothèse tous les jours. Elle la menace de tout révéler à son époux si elle ne le fait pas elle-même.

L’heure des révélations

Prise au piège, elle doit tout révéler à sa famille. Ce qu’elle déclare est à peine imaginable pour un esprit normal. Seuls les esprits tordus comme le mien avaient compris depuis belle lurette que Valérie était devenue psychologiquement instable à cause de la pression de la société.

« Je suis désolée, chéri. J’avais peur que tu me quittes pour une autre femme qui te fera des enfants. Je n’ai jamais été enceinte. A chaque fois, je faisais semblant afin que tu crois que j’ai quand-même des chances de devenir maman. Je faisais tout pour que mes accouchements coïncident avec tes déplacements d’affaires pour pouvoir  me débarrasser aisément de mon faux ventre et préparer mes larmes pour t’annoncer que notre bébé est mort. Je jouais à la fatiguée tous les soirs pour refuser de faire l’amour. Je ne me déshabillais et ne m’habillais qu’à la douche pour que tu ne me vois pas nue et ne comprennes tout de suite que je ne suis pas enceinte. »

Une interrogation subsiste : quel était le but final de toutes ces manigances ?

Valérie avait véritablement l’intention de ramener un bébé à la maison. A la fin de ses grossesses, elle rodait autour des maternités dans l’objectif de voler un nouveau-né qu’elle allait faire passer pour le sien. Ce n’est pas si compliqué, pensait-elle. On voit souvent des bébés laissés seuls sur les lits, tandis que les mamans prennent leur douche ou raccompagnent des visiteurs. Par chance, elle n’avait jamais réussi à voler un bébé et déclarait donc que le sien est décédé.

Le véritable fautif : l’époux de Valérie

Comment peut-on feindre 3 grossesses jusqu’au bout ? Comment peut-on ne pas voir la souffrance psychologique de son épouse ? Je découvre en même temps que les deux enfants du couple sont ceux de l’époux nés d’une précédente relation. Valérie voulait lui donner aussi des enfants pour avoir dans son cœur la même place que la mère de ses enfants. Oui, plusieurs hommes accordent tellement d’importance à la mère de leurs enfants qu’il peut arriver que leurs épouses se sentent rabaissées et menacées, pire si elles n’ont pas d’enfants elles-mêmes. La faiblesse pousse alors des épouses à éliminer les enfants de l’époux pour rompre le lien avec la mère de ses enfants. Nul ne peut deviner qu’elle aurait été l’étape suivante si Valérie n’avait pas été démasquée ?

Pardonner ou pas à Valérie ?

Elle a besoin de soutien plus qu’autre chose. Au lieu de se mettre dans une colère noire, son époux doit lui faire comprendre qu’il est heureux avec elle, si c’est le cas. Donner naissance n’est pas une nécessité vitale. On doit se battre pour y parvenir, mais être capable d’accepter de ne pas y parvenir en fin de compte. Le soutien moral de l’époux compte pour beaucoup dans la façon de ressentir et de vivre la pression que la société met aux femmes. Des Valérie, il en existe partout, peut-être près de chacun de nous et qui élèvent des enfants qu’on croit être les leurs.

 


Moi, Présidente, j’accorderais un salaire aux mères au foyer

Moi, Présidente ? Moi, Présidente…….

Evident d’imaginer ce que je ferais si j’étais élue Présidente. Une  chose est très claire dans ma tête, c’est que je serais rapidement désavouée pour dérive autoritaire. Oui, je serais une présidente dictatrice parce que la dictature marcherait mieux pour faire valider les décisions que je prendrais et accepter que je ne prenne aucune décision, au besoin.

Soit ce qui suit ne saurait se réaliser parce que relevant plus du rêve que de la réalité, soit, Présidente, je subirais un coup d’Etat au bout de quelques mois.

Moi, Présidente, j’accorderais un salaire aux mères au foyer

Bah oui, je suis une mère au foyer. Vous attendiez-vous à autre chose de la part d’une femme qui loue les mérites de celles qui choisissent de s’occuper elles-mêmes de leur progéniture ? Si on demandait à une vendeuse de tomates ce qu’elle ferait, millionnaire, et qu’elle répondait qu’elle ouvrirait une parfumerie, là, ce serait inquiétant.

Pour les mères au foyer, je ferais les choses bien, de quoi leur mettre un peu de baume sur le cœur. La fragilité de leur situation auprès de leurs conjoints est des plus inquiétantes. Refus des responsabilités des pères, abandon des foyers, manque d’informations relatives au droit successoral, la précarité des relations de père-fils résultant du non établissement des actes de naissance, plusieurs conflits familiaux et la fragilité des relations conjugales résultant des « mariages non officiels » m’obligent à penser à améliorer en premier leur statut.

Et je ferais çà… légalement

Au Cameroun, Un projet de code des personnes et de la famille est sur la table des députés depuis plusieurs années. Pendant que certains trouvent que nous avons déjà fait un grand pas en remplaçant, dans le code civil napoléonien de 1804 qui nous est toujours applicable, les mots « français » par « camerounais » , d’autres pensent que, et c’est ce qui freinerait son adoption, que le projet ne colle pas suffisamment aux réalités camerounaises. La polygamie y est érigée en norme, mais ça ne suffit apparemment pas. Cependant, personne n’a pensé à codifier et encadrer la situation de « mère au foyer ».

Moi, Président, j’utiliserais les pouvoirs de la dictatrice que je serais pour insérer dans ce projet de code des personnes et de la famille un paragraphe qui traiterait de la protection civile de la mère au foyer. Ce serait finit les « tu fais quoi avec l’argent alors que tu es seulement à la maison ? » ou les « c’est ton devoir de rester t’occuper des enfants. Tu n’as pas besoin d’argent. Je t’en donne assez pour mes enfants ». Ce paragraphe du code serait ainsi articulé :

« De statut particulier de la mère au foyer

Article 62 : Bénéficie du statut particulier de la mère au foyer toute femme qui ne travaille pas hors du domicile conjugal, soit parce qu’elle n’a pas les qualifications nécessaires pour trouver un travail hors de la maison et est par conséquent résolue à s’occuper de son foyer ; soit parce que, malgré des qualifications nécessaires, elle a choisi de plutôt s’occuper de son foyer.

Article 63 : 1- Un salaire mensuel minimum de 50 000 fcfa est accordé à toute femme qui choisit d’être une mère au foyer.

2- Ce salaire minimum est censé couvrir les frais d’entretien de la maison et des enfants, peu importe que la femme ait ou non des enfants.

3- Ce salaire sera complété d’une prime dépendant du nombre d’enfants auxquels elle donnera naissance,  de 10 000 fcfa par enfant par mois.

Article 64 : 1- Le salaire de la mère au foyer sera payé par son mari ou fiancé, étant donné que les hommes préfèrent très souvent vivre « le viens on reste ! » 

2-  Elle dispose d’un recours auprès de l’employeur de son époux récalcitrant pour se voir attribuer son salaire par une procédure simplifiée de retenue à la source.

3-  En ce qui concerne le mari débrouillard, une action pourra être menée contre lui devant le juge des référés, juge de l’urgence, pour l’obliger à payer le salaire de son épouse ou concubine.

Article 65 : Le refus pour une femme d’aller chercher de l’argent, bien qu’étant qualifiée, ne saurait justifier de la part de son mari (au sens large du terme) un refus de lui verser son salaire mensuel de mère au foyer. »

Et, vraiment, en tant que Présidente dictatrice, je me réserverais le droit d’y ajouter des choses à tout moment. Avec la majorité parlementaire à mon avantage, ce texte passerait comme une lettre à la poste.

Si ce qui précède était un programme politique, je sais que je serais élue, parce que les mères au foyer sont les plus nombreuses. Resterait alors les convaincre d’aller aux urnes. Là, ce serait un tout autre combat!

 

 

 


Ebéni ou l’histoire extraordinaire d’un « père au foyer » dévoué

Contrairement à la norme en Afrique, de nombreux pères restent au foyer pour s’occuper des enfants lorsque la sécurité et la santé de ceux-ci en dépendent.

La plupart de nos sociétés sont machistes. C’est la mère qui reste au foyer pour tenir la maison et s’occuper des enfants. C’est une logique chez nous. Et la femme le sait aussi. A un point tel que, même si le travail de la femme est mieux rémunéré que celui de son mari (ce qui est d’abord difficilement acceptable), c’est elle qui arrêtera de travailler pour s’occuper des enfants. La question ne se pose même pas, pour des couples qui ont une nounou et le jour où celle-ci s’absente, de savoir qui du mari ou de la femme reste s’occuper des enfants. Cependant, on observe de plus en plus des cas où le mari se porte volontaire pour rester s’occuper de ses enfants, surtout lorsqu’il comprend qu’il y va de leur intérêt. C’est l’histoire de mon voisin Ebéni, chauffeur de taxi, qui ne cesse de m’émouvoir.

Ebénézer  a choisi de s’occuper lui-même de ses enfants

Ebéni est un homme qui a la trentaine, s’est marié assez jeune et est père de quatre enfants de 1 à 10 ans. Au début de leur histoire, m’a-t-il confié, son épouse était d’accord pour être une mère au foyer. Ils avaient estimé qu’elle n’avait pas besoin de rapporter de l’argent au couple, car le gagne pain d’Ebeni lui permettait de prendre tout en charge. Tout s’est bien passé pendant 2 ans. Puis un jour, son épouse, qui occupait son temps libre sur internet et dans les forums de discussions sur les droits de la femme, a déclaré qu’elle en avait assez d’être toujours enfermée, comme un « animal en cage ». Avec de l’argent donné par son père, elle acheta un fonds de commerce et se mit à vendre des vêtements pour femmes. Ebéni est sommé par son épouse de trouver une nounou pour ses enfants. Incapable de raisonner son épouse, il emploie une nounou.

Tous les jours à son retour du travail, il était interpellé par ses voisins sur les mauvais traitements que la nounou infligeait à son enfant. Il décida alors de la renvoyer. Au même moment, son épouse attendait leur 2ème enfant. Il cru alors que cette naissance là allait adoucir sa femme. Mais, rien à faire ! Elle retourne à son commerce 2 semaines seulement après la naissance du bébé. Puisque Ebéni refusait d’engager une autre nounou, il nous arrivait d’entendre son bébé pleurer dans la maison fermée pendant plusieurs heures avant de s’endormir de fatigue et de faim. Les 2 parents vaquaient à leurs occupations hors du domicile. Le bras de fer qui s’était installé dans le couple faillit coûter la vie du bébé. Devant les remontrances des voisins, le mari prit alors une décision des plus étonnantes dans notre contexte africain : il s’occupera désormais lui-même de ses enfants.

Pour un Africain, rester au foyer est un aveu de faiblesse… pas pour Ebéni !

Lorsque Ebéni décide de s’occuper lui-même de ses enfants, le couple en a 2 et la dernière de 6 mois est diagnostiquée mal nourrie. Elle est pâle, a un poids en-dessous de la moyenne, son ventre est ballonné, ses cheveux rougissent et tombent. Il devient pour son bébé un infirmier à domicile et s’efforce de la faire reprendre des forces. Bientôt autour de lui, les questions commencent à fuser et des voix de désapprobation s’élèvent.

« Pourquoi permets-tu à ta femme de travailler (la question naturelle posée au mari d’une femme qui a un boulot chez nous) ? Pourquoi tu ne divorces pas et ne te remaries pas avec une femme qui te respectera ? Tu n’es pas un homme. »

Ebéni est fier de sa décision et le fait savoir à tous. Curieuse, je lui ai posé ces mêmes questions. Sa réponse a été à la hauteur de la grandeur de l’homme. Ayant constaté qu’il ne pouvait plus rien pour son couple, il ne se soucie désormais plus que de ses enfants. Son épouse et lui continuent de vivre ensemble. Leur relation se limite au sexe, comme c’est le cas dans de nombreux couples africains. On ne divorce pas aussi facilement chez nous hein. Un jour, alors que son épouse avait quitté la maison en guise de protestation aux brimades de son mari, sa fille aînée lui posa des questions étranges, comme : « papa, maman est morte ? ». C’est ce qui le décida à rester avec sa femme et continuer d’agrandir sa famille. Aujourd’hui, ils ont 4 enfants, tous nés dans des tensions incessantes, mais au moins nés de la même mère, selon le souhait d’Ebéni.

Ebéni a fini par avoir des habitudes de femme

 

Son quotidien ressemble au mien, à la seule différence que sa conjointe ne le réveille pas à 5 heures du matin pour faire l’amour. Il organise ses travaux ménagers au gré des humeurs de ses enfants. Il les réveille tôt, les prépare pour l’école, prépare leur petit-déjeuner, les accompagne à l’école. Revenu de l’établissement scolaire de ses enfants, il fait la lessive, la cuisine, le ménage, la vaisselle. Il va chercher ses enfants à l’école à 13 heures et vient leur donner à manger. Il les fait siester, fait avec eux leurs exercices à domicile. Son temps libre, il le passe à se distraire au carrefour du coin avec sa dernière fille d’1 an dans les bras. Il prend une bière à l’échoppe du coin, en évitant les taquineries des voisins qui l’accusent de souiller la gent masculine.

Le plus drôle c’est lorsque nous, les femmes, nous nous retrouvons à discuter avec lui les prix de vivres frais au marché. Il a tellement acheté d’ingrédients pour qu’il a appris à ne plus se faire avoir par les vendeuses qui ont l’habitude de donner un prix plus élevé aux hommes qui viennent effectuer des achats. « Ne vois pas comme je suis un homme pour augmenter le prix hein ! Le macabo là mérite 500 francs ». Certaines vendeuses en viennent à lui demander quel genre d’homme il est, tellement elles savent que c’est un rôle de femme.

Avec quel argent nourrit-il ses enfants, s’il a choisi de ne pas travailler ?

Ebéni dit lui-même qu’il a la chance d’être encore jeune et d’être déjà papa des quatre enfants qu’il a toujours souhaité avoir. Il a pu s’acheter deux voitures mutées en taxis de ville du temps où il travaillait. Il conduisait l’une d’elles et avait confié la 2ème à son frère cadet. Depuis sa douloureuse décision de devenir « père au foyer », il a confié le taxi qu’il conduisait à un ami. De ses 2 voitures, il perçoit une recette de 20 000 francs cfa tous les jours. Il a choisi de se contenter de ce montant jusqu’à ce qu’il ressente au plus profond de lui qu’il peut les confier à une nounou.

Et au cas où vous vous demandez à quoi sert l’argent de son épouse, ce pour quoi elle s’est battue bec et ongles, eh bien il lui sert à se faire belle et désirable, à entretenir sa féminité, sa jeunesse et son charisme. Elle devient peu à peu une femme d’affaires respectée des autres femmes de l’association. Peu importe le prix à payer pour rester au top, elle aime être le centre de l’attention. C’est son choix et elle y tient

A la place d’Ebéni, quelles décisions prendriez-vous? Quels seraient vos choix de vie?

 


Mesdames, le crâne rasé, c’est mieux pour les petites filles

Raser les cheveux de sa fille relève d’un vrai casse-tête chinois pour la femme. Seulement 3 ou 4 mois après sa naissance, la fille doit déjà supporter de se faire tirer les cheveux avec des chichis pour être « belle » ou pour « ne pas ressembler à un garçon ». Ce sont les raisons principales que les femmes autour de moi avancent pour justifier cet état de choses. Je m’entends d’ailleurs constamment dire que je suis un « tyran » ou que je mets ma fille « mal à l’aise » parce que j’ai décidé de lui raser les cheveux.

Les cheveux longs et les tresses sont  le fruit des stéréotypes

Depuis des siècles, les Hommes ont toujours attaché une signification précise à la chevelure de la femme. Ils sont parvenus à construire autour de la chevelure et des tresses une idée de féminité. Une femme qui a les cheveux courts n’est pas féminine, et par conséquent n’est pas désirable. La société a ainsi réussi à voir dans les cheveux des femmes un signe de sexualité. Relâcher des cheveux longtemps attachés envoie un signal aux hommes pour leur dire qu’on est  désormais libre. Passer ses droits dans ses cheveux pendant qu’on s’adresse à un homme est perçu comme un geste de parade nuptiale. Je comprends que la femme veuille avoir de longs cheveux pour être désirable. Cependant, je ne comprends pas pourquoi elle souhaite la même chose pour sa petite fille. A cette inquiétude, une mère que j’ai interrogée m’a rassurée que c’était simplement pour que sa fille soit belle.

Que signifie le mot « beauté » pour un bébé de quelques mois ?

Si les femmes tressent leurs filles pour qu’elles soient belles, les fillettes ont-elles la capacité de voir la différence? Pour qui est cette soi-disant beauté? Quid du souhait de la différencier du garçon? Les mamans sont particulièrement obnubilées par le souci de différencier la fille du garçon, ceci dès la naissance. La société l’a très bien compris et les aide dans ce sens. En plus du style vestimentaire censé établir la différence, il a été décidé que les cheveux des filles seraient tressés. Ce qui me gène c’est l’âge auquel la fille commence à subir cette douleur car, il faut le dire, les tresses font mal. Moi même j’ai jamais réussi à transcender cette douleur.

Lorsqu’on regarde ces tresses réalisées avec du fil noir et rouge, on imagine bien toute la douleur que cette fillette peut ressentir. Je n’ose pas imaginer le temps que la réalisation d’une telle coiffure peut nécessiter. Crédit photo : moi-même

Tresser un bébé de 4 mois comme je vois ici au Cameroun doit être traumatisant pour l’enfant. C’est la raison pour laquelle elle pleure de toutes ses forces, à défaut de s’exprimer par des mots. La maman fait très souvent la sourde oreille et fouette l’enfant, l’accusant de ne pas vouloir être « belle ». C’est insensé dans la mesure où une fillette ne connait pas la mesure de la beauté. Elle a tout juste l’âge de manger, boire, dormir, se faire changer ses couches et soigner. En réalité, les femmes refusent juste de reconnaître qu’elles recherchent la beauté en leurs filles pour réaliser leur rêve de rester belles malgré des années de mariage et les multiples maternités. « Je sais que je ne suis plus belle. Ma fille le sera pour moi ».

Que faut-il associer au mot « beauté »?

Avant leur scolarisation vers l’âge de trois ans, les enfants reçoivent toute leur éducation des parents à la maison. C’est donc à ces derniers que revient en premier la tâche de leur expliquer ce qu’est la beauté. Si après l’avoir tressé, on répète à la fille qu’elle est belle, elle grandira en pensant qu’on n’est belle qu’avec les cheveux tressés. Par conséquent, elle ne supportera plus par la suite d’avoir les cheveux rasés. C’est ce qui explique le comportement de certaines élèves dans des établissements bilingues où il faut se raser. Elles jouent au jeu du chat et de la souris, jonglant avec les surveillants et les enseignants. Ces filles ne supportent pas de se voir sans les cheveux et préfèrent être mises à la porte de l’établissement tous les jours, plutôt que de se raser convenablement.

La plupart des femmes donnent l’impression que tresser les cheveux de la petite fille est un impératif catégorique, au même titre que lui percer les oreilles. Alors que lenfant doit savoir qu’elle est belle, que tout le monde autour d’elle est beau, sans condition. Elle doit grandir dans l’amour de son image, du reflet que le miroir lui renvoie. La fille doit grandir avec l’amour de l’autre, peu important son aspect. Elle se sentira d’autant plus à l’aise avec son crâne rasé au milieu de ses copines tressées. C’est la promesse que je me suis faite avec ma fille. Je continue de tenir bon devant les accusations de mes voisines d’être un tyran.

Non, une mère qui rase sa fille n’est pas un tyran

Le fait pour une femme de se raser a souvent été considéré comme un sacrifice. Au Cameroun, comme ailleurs en Afrique, les femmes se rasent pour marquer la souffrance causée par la mort d’un proche. En outre, lorsqu’un parent veut punir sa fille trop entreprenante avec les garçons, il lui rase de force les cheveux. Par ce geste, il lui enlève sa féminité, et par ricochet, son charme sexuel. Aucun garçon n’osera plus la contempler, en est-il convaincu. C’est en cela que je suis vue comme une mère trop sévère. On me demande tout le temps pourquoi je punie ainsi ma fille.

J’apprends à ma fille à appréhender son look avec humour. Lorsqu’elle me demande pourquoi je la rase, alors que moi-même j’ai des tresses, je lui explique que les petites filles ne se tressent pas. Je la rassure en lui disant que quand elle sera grande comme moi, elle pourra se faire toutes les coiffures qu’elle voudra. Lorsqu’elle me demande pourquoi certaines élèves de sa classe ont des tresses, je lui réponds que leurs mamans sont têtues et que la maîtresse va les fouetter (chez nous, on fait tout entrer dans le cerveau de nos enfants par la promesse du fouet).

Je trouve ces cheveux sales et préfère du coup qu’elle soit rasée. Crédit photo : moi-même

Avec le crâne rasé, on gagne en temps et en propreté

Les mères se plaignent régulièrement de ne pas avoir assez de temps pour tout gérer. Paradoxalement, elles passent plusieurs heures du week-end à faire à leurs fillettes des tresses aussi compliquées qu’inimaginables, parfois collées au crâne. Ces heures peuvent pourtant être mises à profit pour des activités ludiques. L’enfant pourrait découvrir de nouveaux animaux chaque week-end dans un zoo. Elle pourrait déjà terminer ses exercices à domicile. Ce qui n’est pas le cas dans environ 80 % des cas. Autrement dit, prenez une école quelconque à Yaoundé, sélectionnez 100 filles qui ont des tresses, feuilletez leurs cahiers d’exercices à domicile et vous verrez que 80 d’entre elles ne les ont pas terminé.

Certaines mères ne parviennent carrément pas à tresser leurs filles en tout un week-end. Le lundi sur le chemin de l’école, on voit des fillettes avec des cheveux si sales que j’en ai la chair de poule. Pour toutes ces raisons, je préfère le crâne rasé. Au moins c’est propre. Le cuir chevelu est mieux entretenu. La fillette est à l’abri de nombreuses maladies du cuir chevelu telles que les pellicules et la teigne.

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