Cameroun : les droits successoraux de l’enfant naturel
A la mort d’une personne, l’enfant naturel est souvent victime des conséquences plus ou moins désastreuses des actes de ses parents. Le législateur a essayé de trouver un juste milieu entre l’intérêt de l’enfant et la réparation d’un potentiel préjudice causé.
Définitions de notions
La filiation naturelle est la transmission de la parenté qui caractérise les enfants nés de parents libres, c’est-à-dire non mariés ni l’un ni l’autre, pouvant donc se marier a posteriori. L’historique de cette construction légale est disponible ICI.
La définition précédente traduit exactement la filiation naturelle dite simple. Il existe des cas où l’un des parents est déjà engagé dans un mariage. On parle de filiation naturelle adultérine. Les droits de l’enfant né dans cette condition sont différents. Il existe aussi des cas où les deux parents de l’enfant sont eux-mêmes proches parents, ceci à un degré proscrit. Sur le plan juridique, les relations intimes sont interdites en deçà du 4ème degré de parenté ou d’alliance. Pour le décompte des degrés de parenté, je vous renvoie ICI. L’alliance c’est le lien qui nous unit à la famille de notre époux. Un degré de parenté entre 2 personnes signifie un degré d’alliance entre l’une des 2 personnes et l’époux de l’autre. Lorsque les parents de l’enfant naturel sont parents ou alliés au 1er, 2ème ou 3ème degré, on parle de filiation naturelle incestueuse. Ce qui emporte des conséquences différentes.
En droit camerounais, les droits successoraux de l’enfant naturel sont réglés par les articles 756 à 765 du code civil napoléonien de 1804 applicable au Cameroun.
Condition légale pour succéder : la reconnaissance de l’enfant
L’enfant naturel ne vient à la succession de ses père et mère que lorsque sa filiation a été légalement établie. Concrètement, il doit avoir été reconnu par le défunt de son vivant. A l’égard de la mère de l’enfant, l’accouchement vaut reconnaissance, tout simplement. A l’égard du père, la reconnaissance passe par une déclaration écrite de celui-ci. Les droits successoraux de l’enfant naturel, par rapport à ceux reconnus à l’enfant légitime, sont très réduits et une distinction doit par ailleurs être faite entre l’enfant naturel simple d’une part et l’enfant naturel adultérin ou incestueux d’autre part.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, il faut noter qu’à l’égard de la mère, l’enfant n’est ni naturel, ni légitime. Il n’est donc pas fait de distinction lors du partage de la succession d’une femme, entre ses enfants, nés dans un mariage ou pas. C’est à l’égard du père que ces notions sont évoquées pour distinguer le fils né de son ou de ses nombreux mariages de celui né en dehors d’un mariage.
La part successorale de l’enfant naturel
L’enfant naturel simple bénéficie, en présence d’enfants légitimes, de la moitié de ce qu’il aurait eu s’il eût été légitime. Ceci signifie que si le défunt laisse 4 enfants légitimes et un enfant naturel, les biens sont répartis en 5 parts égales. Les légitimes recueillent chacun tout d’abord un cinquième des biens. Le cinquième restant est divisé en deux parts égales : la moitié est attribuée à l’enfant naturel et l’autre moitié redistribuée entre les enfants légitimes. Le calcul serait le même quand bien même on aurait un seul enfant légitime et 10 enfants naturels. L’enfant naturel simple bénéficie des trois quarts de la succession lorsque le défunt ne laisse pas d’autres descendants, mais bien des ascendants, des frères ou sœurs ou des descendants légitimes de ceux-ci. Enfin, il a droit à la totalité des biens lorsque le défunt n’a laissé aucun des héritiers précités. Il ne dispose cependant de droit que sur la succession de ses père et mère, à l’exclusion de tout autre parent.
L’enfant naturel adultérin ou incestueux est frappé d’une incapacité de recevoir à titre gratuit. Il ne peut lui être fait aucune donation entre vifs (de son vivant) ou par testament. La loi ne lui accorde que des aliments sur la succession de son géniteur. Cette prescription légale a été instituée pour décourager d’une part les personnes mariées coupables d’adultère ; d’autre part les mariages au sein de la famille comme dans l’antiquité et le moyen âge. Les dirigeants ont déclaré dès les temps modernes que c’était immoral d’épouser sa nièce. De plus, avec l’évolution de la médecine, on a découvert que certaines maladies osseuses dites orphelines telles que la fibromyalgie et génétiques sont la conséquence du degré très proche de parenté entre les parents de l’enfant. Mais, jusqu’à quel degré donc?
A titre de droit comparé, le code civil français a évolué jusqu’à l’abolition de la distinction entre les enfants légitimes et ceux naturels lors de la détermination des héritiers. L’article 733 du Code civil français, issu de la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral, dispose désormais : « La loi ne distingue pas entre la filiation légitime et la filiation naturelle pour déterminer les parents à succéder ».
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